05-07-2021
Ecrins
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TD
6
1

1 – 2016. Enthousiasme et naïveté du novice.

J'ai commencé l'escalade il y a quelques mois, en salle, comme la majorité des pratiquants de nos jours. Au Mur de Lyon, le 6a passe bien et je commence à regarder ce qui pourrait être réalisable dans ce niveau mais dehors, « pour de vrai ». La salle, c'est bien, mais les grandes voies, ça a quand même l'air beaucoup plus classe...

Le dossier « grandes voies » des favoris internet est créé fin février 2016. La première page listée dans ce dossier : https://www.camptocamp.org/waypoints/39006/fr/aiguille-dibona

Les voies en 6a ont l'air superbes, et en plus ça a l'air d'être de la dalle... trop facile ! Sauf qu'à ce moment, mes Miura n'ont jamais touché un vrai rocher, pas même en couenne... le crash test avec la réalité arrive assez vite. En fait, pour les grandes voies en 6a en montagne, il va falloir progresser un peu.

 

2 – Camp du Gaul 2017

Nouvelle recrue au Gaul, mes chaussons voient de plus en plus de rocher. Nous voilà au refuge du Soreiller. Il suffit d'en sortir pour contempler la star des lieux, Visite Obligatoire. Notre cher président me fait cependant comprendre que cette entreprise demeure quelque peu prématurée (en réversible en tout cas)... tant pis, nous irons à la Tête du Rouget, dans la moins célèbre mais tout aussi magnifique Version Originale.

 

3 – Camp du Gaul 2021

Les Gaulois ont voté, ce sera la Bérarde. Benoit est également chaud bouillant pour aller à la Dibona. Le refuge est réservé une semaine à l'avance ; nous montons sous la pluie le dimanche.

Le débat du soir : se chauffer avec la Face sud classique ou attaquer directement avec notre objectif #1 ? Le tour de table révèle que seules 2 cordées prendront le départ dans Visite Obligatoire le lendemain : 3 espagnols en flèche et une cordée de 2. Nous décidons de ne pas laisser passer cette aubaine et prévoyons de les laisser partir avec de l'avance afin de pouvoir grimper au soleil.

C'est donc sans se presser que nous déjeunons entre 7 et 8h lundi. Un coup d'oeil sur la voie : la cordée de 2 est au deuxième relais et les espagnols sont à l'attaque. Ok, on va commencer à se préparer pour y aller... mais qui sont ces 5 personnes qui viennent d'arriver au refuge, montés ce matin ? Le CAF de Nice.

  • « Vous faites quoi ? »

  • « Visite Obligatoire »

  • ..

On n'est pas trop du genre à s'affoler, mais là, on fait une exception. Branle-bas de combat ! On fait les sacs en 30 secondes et on court littéralement vers l'attaque. Put***, j'ai oublié mes lunettes de soleil ! Je redescends, cours au dortoir, récupère mes lunettes et rejoins Benoit au bas de la voie. Merci les 5 minutes d'approche ! Heureusement, les 5 nouveaux prétendants se remettent tranquillement de leur montée matinale et semblent moins pressés que nous.

Pierre – Feuille – Ciseau ! La première longueur sera pour moi. Dixit le topo, « première longueur où le libre très obligatoire constitue un test irréfutable pour la suite ». Avec maintenant 5 personnes en attente derrière nous, je n'ai pas envie d'être le boulet qui ralentira tout ce beau monde. Les points sont effectivement espacés, mais rien d'extrême. Par contre, il ne faut pas compter dessus pour tricher, ça grimpe tout le long. Le mur raide puis la dalle passent plutôt bien (l'aller-retour au refuge m'a bien échauffé). Ouf !

Benoit attaque la deuxième longueur. Un peu moins chaud, il se tape une belle tremblante des genoux dans un pas de dalle un peu fin... toujours impressionnant à observer vu du dessous, mais les choses rentrent vite dans l'ordre. Pendant ce temps, la première cordée redescend en rappels dans la voie.

La suite déroule bien. J'ai le souvenir d'un pas fin au dessus du relais de la 3ème longueur ; des 2 surplombs de L4 qui demandent un peu d'engagement, ça passe nickel pour Benoît. La 5ème longueur, toute en rondeurs, commence à faire mal aux avant-bras. Sur les conseils de la gardienne, j'avais pris un friend rouge ; je l'ai placé pour aider le mental.

A R6, les CAFistes observent les 2 gaulois au-dessus d'eux, accroupis à R7, les mains proches du visage, paumes face à la tête... ils prient ? Non. Benoit a perdu sa lentille, tombée dans le tas de cordes à nos pieds. On la retrouve, on la reperd, ... je finis par placer mes mains sous ses yeux pour la récupérer. Après plusieurs tentatives, elle retrouve sa place.

L8 est magnifique, verticale, sur des écailles bien physiques. Les dernières longueurs font goulot d'étranglement avec les autres voies et ça commence à bouchonner, mais rien de méchant.

Nous arrivons au sommet après environ 6h dans la voie. Même s'il est espacé, l'équipement est béton. Nous avons grimpé concentrés, mais jamais « taquet » ou « terreur ». La première longueur donne effectivement le ton pour la suite.

Au global, une superbe voie très homogène sur un rocher irréprochable, et surtout une sorte de rite de passage pour se dire que le 6a, c'est acquis ! Éviter d'y aller le weekend... le remplissage du parking des étages constitue certainement un bon indicateur de l'affluence dans la voie.

 

Prochaine étape à planifier : Voyage pour l'Orient, afin de boucler la trilogie des V.O. du cirque du Soreiller !