29-05-2021
Vercors
PD
Raph
1

En ce samedi matin, j'arrive à Grenoble par le premier train. Raph, un bon copain qui n'a comme défaut que de ne pas être Gaulois, passe me récupérer avant de nous emmener jusqu'à Villard de Lans. Arrivé sur le parking, le temps de refaire les sacs et nous partons sur les coups de 9h. Nous avons hésité quant au matériel à emmener : le printemps est bien avancé, et ici la neige ne s'est pas autant accumulée que plus haut dans les Alpes. Cependant, il reste des névés à de nombreux endroits. Depuis notre position, on distingue le parcours de la course, et celui-ci semble sec. Même la partie goulotée du couloir de la double brèche apparait déneigée. Seul un large névé survit dans les pentes terminales. On emportera quand même crampons et piolets, au cas où la neige y serait dure. Ils ne nous serviront pas.

L'approche est bucolique, dans ce Vercors qui se prépare à accueillir l'été. Sur les sentiers, il n'y a pas grand monde. Il faut dire que la météo annonçait une journée mitigée : nuageux le matin, des risques d'averse l'après midi. Pour le moment, le plafond nuageux est assez haut et la luminosité plutôt bonne. L'accès à l'attaque nous échauffe bien. Nous y rejoignons une cordée qui nous a devancé. Derrière nous, on aperçoit 3 groupes qui montent vers nous. On ne va pas être seul. On s'équipe, ce qui permet à nos prédécesseurs de prendre un peu d'avance. Le couloir est assez raide, sans difficulté mais il faut tout de même prendre gare où l'ont met les mains. Le fond est friable, il s'agit de ne pas se bombarder mutuellement.

Arrivés à la double brèche, plus aucune trace de ceux de devant. Quand aux cordées derrières nous elles doivent être encore en bas. On est seul, et c'est un plaisir. Je prends la tête, aux premiers mouvements au dessus du vide le vertige se rappelle à moi. Heureusement, l'endroit n'est pas très raide, et la grimpe facile. Quel plaisir de sentir le grain du rocher sous les doigts, ça change de la neige! J'aurais pensé avoir perdu tout physique, mais c'est d'ailleurs que viennent les premières difficultés : je passe un long moment pour protéger une fissure, j'ai perdu mon oeil pour trouver LE friend pour LA fissure. "ça va revenir" me dis-je.

Ici, la progression est parfaite pour une reprise. Peu soutenu et sans réelles difficultés, alors je joue le jeu de l'arête et cherche à rester sans cesse sur le fil (la majorité des difficultés peu s'esquiver par des vires côté Villard de Lans). J'avais déjà fait ce parcours il y a plusieurs années, en montant par Prelenfrey. Mais mes souvenirs sont suffisamment vagues pour me laisser le plaisir d'une (re)découverte.

Nous avançons à un bon rythme. Aucun bruit derrière nous, seul deux silhouettes au loin qui arrivent déjà la fin du parcours. Le rocher est bon, mais il convient de rester prudent : souvent des morceaux d'arête présentent une belle zone de rocher jaune tout frais, signe d'un effondrement récent. Arrivé à la sortie du pilier Martin, nous avons fait les deux tiers du chemin. On s'arrête pour une longue pause bien méritée. C'est qu'on commençait à avoir soif! Je laisse la tête à Raph pour la fin du parcours. De la pluie devrait arriver mais c'est tout le contraire qui se passe : le ciel se dégage un peu, et le soleil commence à taper. Il n'y a pas de vent, à l'exception de quelques rafales à la vitesse modérée.

Nous atteignons le rappel qui marque la fin de la traversée. Notons qu'il est possible de poursuivre le parcours par un itinéraire rarement parcouru, "l'intégrale du Gerbier". Le rocher n'y est pas très bon et le terrain un peu "mouvant", mais ça a l'avantage d'offrir un cadre plus sauvage que le Gerbier classique. J'avais parcouru ce bonus lors de ma précédente venue, alors nous nous arrêtons là. On croise un touriste britannique, en trail, qui nous demande si il est possible pour lui de traverser les arêtes. On lui répond d'un anglais hésitant que ça nous parait une très mauvaise idée, et luis conseillons de rejoindre le col vert par le sentier.

Lors de la descente, nous aurons le plaisir de traverser un immense troupeau de bouquetins qui profitent tranquillement du soleil tout autour du soleil. On en décompte 80, à la louche. Enfin, un arrêt dans les locaux tout neufs de la brasserie du Vercors pour une petite mousse clôture l'après midi, avant un long retour sur Lyon par le train.

Voilà une reprise sur le rocher très agréable, un vrai plaisir de traverser les crêtes dans ce si beau cadre.