09-07-2023
Valais
2530
1830
4360
AD
13H
2

Ca faisait déjà une semaine que je profitais de ce beau coin d’Arolla, tantôt au camping, tantôt dans les refuges, tantôt sur le rocher tantôt sur la glace. Et tout ça sur mes 2 pieds pour une fois :-).

Nous étions samedi, le temps s’annonçait beau encore pour quelques jours mais incertain ensuite, il fallait que je me décide si je voulais profiter de cette fenêtre pour remonter en altitude. Pas trop de question côté forme : je ne vais toujours pas bien vite mais je suis acclimatée et j’ai remis le pied sur le rocher de montagne grâce à mes équipier-ère-s de la semaine passée.

Emeric et Sylvie ont un super projet de sommet+traversée glaciaire qui devrait les faire finir au sommet de la Dent Blanche, sur laquelle j’avais déjà bien flashé dans les livres et encore plus quand je l’ai vue en vrai. Louis et Maëlle sont de ce projet aussi. Je me dis que ce serait pas mal que que je les retrouve au refuge  pour faire cette jolie course de la Dent Blanche ensemble mais pour l’instant je n’ai pas compagnon-ne de cordée et j’hésite parce c’est long et au max de ce que je peux faire sans me faire peur, mais quelle belle arête quand même, j’hésite encore…C’est Louis (merci à toi) qui débloque la décision en en parlant à Bruno qui doit arriver le lendemain au camp. Bruno semble ok alors qu’il avait le projet d’aller à la Dent Blanche par une voie bien plus difficile, l’arête Ferpècle, que Louis lui déconseillera. On discute un moment ensemble au téléphone de comment on voit la sortie, de nos formes respectives et on tombe d’accord sur faire cordée, l’heure de départ pour monter au refuge, car comme pas mal refuges autour d’Arolla, la montée au refuge n’est pas une formalité.

A l’arrivée de Bruno le samedi soir, il y aura finalement aussi Antoine intéressé par la balade qui n’aura pas trop de mal à convaincre Jérémy déjà sur place de se joindre à nous pour faire 2 cordées. Mais entre temps, j’apprendrai que Sylvie et Emeric ne seront pas au RDV pris au pièges des douves blanches (cf. cr Emeric)…heureusement sans conséquence grave, ils pourront re-programmer une jolie course en fin de séjour. Les organisations sur le fil du camp du Gaul, quoi ! ;-)

Nous partons donc dimanche matin de Ferpècle vers 11h30 pour le refuge de la Dent Blanche. Bruno a mal au dos…Beau sentier de randonnée au départ jusqu’à Bricola où nous picniquons et rencontrons Delphine (la sœur de Maëlle) et Paul qui reviennent de la traversée glaciaire prévue et qui ont laissé Louis et Maëlle au refuge. On laisse l’alpage de Bricola pour remonter le vallon glaciaire maintenant nu. La montée alterne entre sentier morainique parfois bien raide, dalles et neige. C’est vraiment pas une formalité de monter là haut : ça passe pas bien avec les tongs ! Mais le manque d’acclimatation n’a pas l’air de gêner ni Bruno, et encore moins Antoine. Quant à Jérémy, il finit par porter les deux cordes ! D’ailleurs Bruno m’assure qu’il a beaucoup moins mal au dos, en marchant, avec un sac lourd…Va comprendre ! Bruno fait quelques pauses pour jeter un œil sur la voie qu’il avait envisagée, ça a l’air long….On apprendra au refuge que 2 cordées y sont, l’une qui arrivera au refuge à 21h le soir même, et l’autre le lendemain matin.

Arrivés au refuge vers 18h, on retrouve Maëlle et Louis qui bullent depuis la fin de matinée, et qui ont sympathisé avec un jeune guide français. L’accueil est plutôt chaleureux là-haut mais il faut avoir un peu l’humour suisse je dirais ;-)…Le repas arrive vite et,- au joie, au bonheur !-, au menu : des pââââtes ! Tout est vraiment réuni pour moi pour tenter cette belle course. Je mange…beaucpoup ! On sait jamais, demain je ne sais pas à quelle heure je mangerai pour de vrai, et à ce moment là, je ne pense pas si bien dire.

Le lever se fera à 4h30, ce que je trouve un peu tard vu la course. Tout le monde ou presque est déjà parti quand on décolle à 5h15. Le bon côté des choses c’est qu’il fait déjà jour, et c’est bien, parce que la course commence à grimpouiller déjà derrière le refuge, au moins on voit où on met les pieds et où on doit passer.

Ca commence doucement par du rocher, de la neige, du rocher puis on attaque l’arête proprement dite en mixte. Bruno s’adapte parfaitement à mon rythme, je me sens plutôt bien. Le soleil se lève sur nos illustres voisins, Cervin, Dent d’Hérens, Mont Rose et tous les 4000 autour de Zermatt, c’est magnifique. Dans le mixte, nous garderons les crampons toute la course car de nombreux passages seront à négocier dans la neige/glace parfois raide, et la fin de l’arête, tout effilée, est encore entièrement en  neige. Nous contournons le grand gendarme cité par le topo, le couloir remontant son flanc étant encore plutôt en neige. Ca laisse malgré tout encore quelques passages bien grimpants. Vers 8h30-9h, nous croisons des cordées qui redescendent déjà (dont Maëlle et Louis) à un endroit pas franchement pratique, les cordes et les sangles se croisent dans tous les sens, on perd beaucoup de temps et Bruno, resté à l’ombre tout ce temps pour m’assurer aura fini de prendre froid ce matin là. Puis nous reprenons, toujours « au pas du guide », notre progression sur l’arête où Bruno parvient toujours bien à protéger les pas difficiles. La partie neigeuse est très élégante pour finir, parfois très gazeuse mais en bonnes conditions. C’est à 11h00 que nous atteindrons le sommet, après Antoine et Jérémy, devant nous pendant toute la montée. Tous les 4, on prend 1/2h quand même pour admirer ce paysage grandiose, il n’y a pas de vent, il fait bon. Mais quand même on ne traine pas, ça ramollit vite, et je me dis que tout ce qui grimpait agréablement bien, va falloir le redescendre, et à c’est souvent moins agréable…et plus difficile, surtout que là c’est le second qui ouvre, donc moi ! On quitte le sommet vers 11h30 et on atteint assez rapidement la partie rocheuse. Très vite, on décidera également de mettre en commun nos cordes pour enchainer les rappels, ça nous prend du temps, d’autant qu’une fois ou l’autre on descend pas exactement du bon relais donc on n’arrive pas exactement non plus au bon endroit. Et les traversées dans le rocher en neige molle, c’est pas génial non plus. On ne part jamais assez tôt qu’il disait l’autre….Après des heures qui passent comme des quarts d’heure, on finit par atteindre la selle neigeuse qui annonce la fin des difficultés mais on n’y est pas encore !!! Et moi je suis fatiguée, un peu physiquement mais surtout mentalement, je dois faire des efforts pour me concentrer encore un peu et ne pas me faire mal bêtement, du genre me casser/tordre un pied dans les rochers. Je me dis qu’il faut que je reste vigilante jusqu’à la terrasse du refuge. Vu l’heure (19H), Bruno évoque la possibilité de redormir au refuge, ce qui me convient parfaitement mais qui n’a pas l’air de convaincre Antoine et Jérémy, bien prêts à rejoindre le camping d’Arolla encore ce soir. Un départ prévu pour l’un le lendemain, une envie d’en finir pour être tranquille le lendemain pour l’autre les feront descendre à toute vitesse juste avant la nuit à la voiture. Bruno sent bien la fatigue me gagner et restera bien avec moi jusqu’au bout alors même qu’il doit considérer qu’il n’y a plus de difficultés. C’est très appréciable pour moi. Arrivés au refuge, le gardien est ok pour que nous repassions une nuit, il reste un peu de place, un peu de pâtes aussi, des œufs durs tout rose sortis d’on ne sait où et nos restes respectifs de picnic J’ai rarement goûté à ce plaisir d’une soirée en refuge d’altitude sans pression pour le lendemain, je l’apprécie bien et Bruno aussi je crois. Le départ du matin se fera calmement en regardant le soleil se lever sur les glaciers qui nous relient à la cabane Bertol et en papottant avec le gardien qui nous raconte ses exploits dans le coin et sa vie ailleurs aussi. Puis nous attaquons tranquillement la descente, en continuant nos discussions diverses et variées. En se pressant un tout petit plus, on aurait même pu avoir le bus à Ferpècle pour redescendre dans la vallée mais on n’y a pas pensé la veille. Cela nous a valu un bon bout de route goudronnée à pied jusqu’à la Forclaz où on a pu monter dans un bus. C'est le prix à payer de notre nuit en refuge...Arrivée en vallée, Emeric et Antoine auront la gentillesse de venir nous chercher aux Haudères ce qui nous évite d’attendre le bus pour Arolla pendant 1h30 et nous permettra de déjeuner agréablement avec eux et ceux restés au camping ce jour-là.

Je remercie très chaleureusement Bruno en tant que premier de cordée, pour sa patience, son calme, sa pédagogie, avec quelqu’un qu’il ne connaissait pas sur une corde. Mais je le remercie aussi en tant que camarade avec lequel j’ai pu engager multes des discussions et questions passionnantes lors de ces moments partagés. Et merci également à Antoine et Jérémy d’avoir toujours gardé un œil sur nous pendant cette course, à Antoine en particulier pour avoir géré très prudemment la descente du sommet. Vous aurez tous les 3 contribué à la réussite de ma dernière belle sortie en haute montagne de ce beau camp estival du Gaul à Arolla.