25-07-2021
Ecrins
2500
PD
13h
2

Récit du nouveau but Gaulois à la Muzelle, cru 2022, à la suite de Xavier Gok & David Pillot en 2021, et Frédérique Mesnage en 2020.

 

[AVERTISSEMENT : ce compte-rendu ayant été rédigé par un néophyte, l’exactitude et la précision des informations techniques n’est pas garantie !]

 

Il y a des sorties qui s’organisent avec fluidité… et d’autres moins.

Proposée en encadrée il y a plusieurs semaines par Rémi et Elisabeth, la roche de la Muzelle a attiré de nombreux volontaires, oligeant au tirage au sort. Mais ce n’est qu’après moult péripéties et de longs suspens que la composition finale de l’équipe sera connue, la veille au soir du départ : ce sera finalement sans Elisabeth, vaincue par la fièvre covidique, ni aucune des sélectionnées initiales !

 

Samedi matin les discussions vont bon train dans la montée vers le refuge de la Muzelle, l’occasion de se connaître et d’oublier un peu que les jambes manquent d’exercice. Arrivés au refuge nous avons largement le temps de faire la sieste, réviser l’encordement, régler les crampons, préparer les sacs et même découvrir le “jeu de la montagne” (aux éditions Noisette), sorte de jeu de l’oie qui fait également office de compendium de toutes les merdouilles que l’on peut rencontre en montagne.

 

Le lendemain nous partons à 4h30 avec un retard somme toute raisonnable et sous un souffle étonnament chaud. Rémi impose un rythme tranquille, adapté à l’heure indue. Nous passons à travers la roche percée au-dessus du refuge puis, juste avant d’attaquer la moraine, découvrons les feux scientillants des Deux Alpes endormis (plus joli de nuit que de jour !). Le sentier vient finalement buter contre une arête rocheuse. Cette variante d’accès au glacier, mentionée dans le topo, nous tente au premier abord car elle semble plus évidente que les éboulis qui mènent aux premières pentes de neige. mais considérant le temps supplémentaire que cela impliquerait, nous restons sur l’itinéraire classique. L’éboulis n’est finalement pas si terrible et, quelques pas d’escalade qui réchauffent plus tard, nous touchons enfin la neige.

 

Je confesse tout de suite ma peur irrationnelle de cet élément et l’on me répond par des conseils fort avisés. Rémi part en tête avec JC et Cyril, nous suivons avec Bruno, Edith et moi au milieu. Plus haut nous abordons le glacier dans des conditions peu idéales : non seulement il n’y a pas eu de regel, mais la couche de neige a grandement souffert de la récente canicule. Dans les endroits les plus raides la glace n’est pas loin. Pour pimenter le tout, les crampons de Bruno lâchent l’un après l’autre, obligeant à des rafistolages en pleine pente. Heureusement la rimaye s’évite largement par la gauche. Au couloir menant au col Jean Martin, Rémi décide de remonter par les rochers rive droite. Je découvre ce qu’est le mixte, avec un sentiment plus mitigé encore qu’envers la neige. En haut du couloir, l’arête qui nous mènera au sommet nous attend sur l’autre rive, nous obligeant à une traversée du couloir en glace guère évidente pour les débutants que nous sommes. Nous attendons un certain temps que la cordée de Rémi traverse puis quitte l’étroite vire rocheuse avant de nous engager nous-mêmes. Quelques mètres plus haut Bruno déclenche (involontairement selon ses dires) une mini-coulée de roches qui me touchent aux poignets et à la cuisse. Je pousse un cri mếlé de surprise et de douleur, avant de constater qu’il n’y a rien de cassé. Cependant je me sens sacrément secoué, je n’ai qu’une envie c’est de quitter cette pente froide et instable pour un relai béton dans lequel je peux me pendre à loisir (à défaut du plancher des vaches). Ce que je ne savais pas encore c’est que ce rêve était à portée mais devait se mériter : avant de le réaliser il nous aura fallu traverser le fichu couloir (opération facilitée par les trous laissés par Bruno, passé avec un seul crampon !) puis franchir un mur raide que, dans les conditions qui étaient alors les nôtres, j’aurais volontiers côté comme un surplomb en 5c.

 

Enfin regroupés sur le relai tant désiré, il est temps de faire le point sur la situation. Il paraît trop tard pour tenter le sommet et, du moins en ce qui me concerne, j’estime avoir eu ma dose d’aventures pour la journée. Un premier rappel de 60m nous amène au pied du couloir, puis une “main courante” nous facilile la descente de cette portion la plus raide. A ce moment de la journée (vers 11h ou midi, je ne sais plus) la neige est déjà bien chaude. Mais après la rimaye les pentes s’adoucissent et débarouler dans la neige devient un vrai plaisir. Nous rejoignons la moraine par un chemin légèrement différent de la montée qui nous permet de poser quelques protections, histoire d’en justifier le transport à dos de Bruno.

 

De retour au refuge un bouquet de sirops de violettes éclot sur la terrasse et les dernières vivres sont partagées et dévorées jusqu’à la dernière miette. Partiellement requinqués nous attaquons enfin les 1200m de dénivelé jusqu’au parking qui, une fois n’est pas coutume, ont paru plus longs qu’à la montée.

 

Une grande partie de la journée, une question me taraude : est-ce que c’est ça l’alpinisme facile ? Sapant nos doutes et nos craintes, Rémi nous assure que la cotation (PD+) est ici trompeuse et les conditions de la course exceptionnellement mauvaises et guère adaptées à une initiation ; Bruno en rajoute une couche en jurant n’avoir jamais eu autant de galères ! Il paraît que, même sans avoir atteint le sommet, nous aurions déjà réalisé une “belle bambée”. Aucun doute là-dessus : 3 jours plus tard nos jambes s’en souvenaient encore...